Un article précédent du Médiévaliste vous avait mis l'eau à la bouche, voici le plat principal: oui les premières sociétés par actions sont nées au 13e siècle, et avec elles le fonctionnement capitaliste que l'on connait bien aujourd'hui. C'est autour de 1250 que naît la Société du Bazacle, la plus ancienne société capitaliste du monde, pour exploiter les moulins à eau de cette région proche de Toulouse.
Mais prenons un peu de recul. Au 11e, 12e et 13e siècle, la France a vécu une révolution industrielle souvent passée sous silence. Alors que les mécanismes types moulins à eau, vent ou marée étaient connus depuis l'antiquité, ce n'est que le Moyen-Age qui a réellement adopté la mécanisation. A titre d'exemple, un moulin à eau pour moudre le blé pouvait moudre 1500 Kg de blé par jour, ce qui nécessitait normalement d'employer 40 personnes. Largement attisée par une explosion démographique, cette révolution industrielle a généré des besoins constamment accrus en énergie. Et l'eau était l'énergie à tout faire : écraser le grain, fouler les draps, le tabac, tanner les peaux, nettoyer les canalisations, etc.
D'où l'explosion du nombre de moulins en France. En outre, les moulins se révélaient être d'excellents placements car ils se louaient fort cher: une importante mise de départ était nécessaire, mais elle générait des rendements de 15 à 30% par an! Pour protéger l'investissement initial, les propriétaires de moulins disposaient de droits, et il était interdit de construire un moulin proche d'un autre, ou cela donnait lieu à d'importants dédommagements.
C'est donc au milieu du 13e siècle que des citoyens de Toulouse forment une société par action, la Société du Bazacle. Chaque action s'appelait un uchau, et valait 1/8e de moulin. Les 96 actions représentaient donc les 12 moulins du Bazacle. Les actions étaient échangées sur un marché libre comparable à la bourse, et les droits des propriétaires ne surprennent personne aujourd'hui: distribution de dividendes, lecture annuelle des comptes, choix des mandataires sociaux qui administrent la société pendant un an, pouvoir d'acheter d'autres moulins ou de gérer les employés, etc. Des procès ont d'ailleurs rythmé la vie de la société, qui protégeait ses intérêts et essayait de couler ses concurrents sur la Garonne. C'est à partir de 1370 que la société est réellement devenue une société anonyme, au sens où les porteurs n'avaient plus des parts de moulins mais bien les parts de la société possédant les moulins. La valeur des actions montait et descendait en fonction des crues de la Garonne, ou des événements comme les épidémies de peste.
Au 18e siècle on parle d'actionnaire, et au 19e siècle le mot actions remplace les uchaus. Au 19e siècle le barrage de Bazacle est transformé pour produire de l'électricité, et la plus vieille société par actions au monde disparait après 1945 lors de sa nationalisation par EDF !
Lire "Aux Origines des sociétés anonymes, les moulins de Toulouse au Moyen-Age" De G. Sicard
Lire "La révolution industrielle du Moyen-Age" De Jean Gimpel
Voir le site de la bourse EuroNext
Mais prenons un peu de recul. Au 11e, 12e et 13e siècle, la France a vécu une révolution industrielle souvent passée sous silence. Alors que les mécanismes types moulins à eau, vent ou marée étaient connus depuis l'antiquité, ce n'est que le Moyen-Age qui a réellement adopté la mécanisation. A titre d'exemple, un moulin à eau pour moudre le blé pouvait moudre 1500 Kg de blé par jour, ce qui nécessitait normalement d'employer 40 personnes. Largement attisée par une explosion démographique, cette révolution industrielle a généré des besoins constamment accrus en énergie. Et l'eau était l'énergie à tout faire : écraser le grain, fouler les draps, le tabac, tanner les peaux, nettoyer les canalisations, etc.
D'où l'explosion du nombre de moulins en France. En outre, les moulins se révélaient être d'excellents placements car ils se louaient fort cher: une importante mise de départ était nécessaire, mais elle générait des rendements de 15 à 30% par an! Pour protéger l'investissement initial, les propriétaires de moulins disposaient de droits, et il était interdit de construire un moulin proche d'un autre, ou cela donnait lieu à d'importants dédommagements.
C'est donc au milieu du 13e siècle que des citoyens de Toulouse forment une société par action, la Société du Bazacle. Chaque action s'appelait un uchau, et valait 1/8e de moulin. Les 96 actions représentaient donc les 12 moulins du Bazacle. Les actions étaient échangées sur un marché libre comparable à la bourse, et les droits des propriétaires ne surprennent personne aujourd'hui: distribution de dividendes, lecture annuelle des comptes, choix des mandataires sociaux qui administrent la société pendant un an, pouvoir d'acheter d'autres moulins ou de gérer les employés, etc. Des procès ont d'ailleurs rythmé la vie de la société, qui protégeait ses intérêts et essayait de couler ses concurrents sur la Garonne. C'est à partir de 1370 que la société est réellement devenue une société anonyme, au sens où les porteurs n'avaient plus des parts de moulins mais bien les parts de la société possédant les moulins. La valeur des actions montait et descendait en fonction des crues de la Garonne, ou des événements comme les épidémies de peste.
Au 18e siècle on parle d'actionnaire, et au 19e siècle le mot actions remplace les uchaus. Au 19e siècle le barrage de Bazacle est transformé pour produire de l'électricité, et la plus vieille société par actions au monde disparait après 1945 lors de sa nationalisation par EDF !
Lire "Aux Origines des sociétés anonymes, les moulins de Toulouse au Moyen-Age" De G. Sicard
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